Ce que les Anciens ont légué dans la Nature et dans la société à leurs descendances, il n'est pas assuré autant pour les générations futures du peuple de Yokaam dans l'Etat actuel de Pagaal. Les Anciens ne vivaient pas seulement de la Nature mais pour la
faire vivre le plus longtemps possible à Yokaam. Je crois qu’on peut dire cela
d’un homme qui durant toute sa vie a eu à conduire au départ un couple, une
génisse et un bouvillon jusqu’à établir un immense troupeau et qui, pourtant
durant toute sa vie, ne sut jamais quelle est la saveur de la viande de vache,
la saveur du lait frais de vache, la saveur du lait caillé de vache, trouvant
sa pleine satisfaction dans la satisfaction du bétail revenant des immenses
pâturages où la nature a répandu toutes choses nécessaires en surface et en
profondeur pour toutes choses dans le devenir. Au temps des Anciens, les
citoyens de Yokaam ne vivaient pas comme si la Nature n’était pas à elle-même
et pour elle-même mais absolument pour l’homme et comme si l’existence humaine
consistait pour chacun, pour chaque homme, chaque famille, chaque Etat à
prendre de la nature le maximum possible pour s’assurer le maximum possible de
durer dans l’histoire et avec le maximum de satisfaction. Je n’ai pas vécu
beaucoup avec eux, je n’ai rencontré que les derniers à Yokaam. Mais à Yokaam,
il arrive que les Anciens soient plus présents et quand nulle part dans leur
cité, on ne voit presque plus aucune de leurs traces vivantes, malgré la
multitude de leurs descendances. Jamais pour les Anciens, la nature n’a été une
proie à abattre n’importe où et n’importe quand. A Yokaam, je n’ai jamais vu un
homme tuer un mouton, une chèvre ou une vache, un chameau pour n’importe quoi, pas
même pour faire plaisir à Dieu, parce que Dieu ne peut pas préférer voir des
milliers et des milliers de vie mourir dans la nature en son nom que de les
voir continuer leur chemin dans la vie quand il est encore possible de le faire.
Jamais je n’ai vu un homme ou une femme se lever d’elle-même, de sa seule
liberté et de sa seule autorité pour aller chasser dans la forêt de Yokaam. C’est
toujours ensemble que les hommes valides faisaient la chasse annuelle et
rituelle à Yokaam, avant l’entrée de la saison des pluies et cette chasse était
liée à cette autre activité. Jamais à Yokaam, je n’ai vu une famille consommer
du lait d’une vache qui vient de mettre un veau au monde ou consommer le
nouveau mil sans commencer par donner aux morts leurs parts aux cimetières ou à
l’autel de leurs pangols. Ils vécurent en très bonne santé dans une nature
pleine de santé. Ils vécurent heureux et la nature fut je crois satisfaite de
leur existence et ce n’est pas seulement parce qu’ils ne la transformèrent pas
profondément. Certains diraient que partout l’instinct de transformer la nature
et la nécessité de la transformer se présentent à l’homme pour survire et que
seul l’ignorance, le déficit de science et de technique ou l’abondance furent
les causes de la longévité de l’abondance, de la diversité et de la santé de la
nature à Yokaam et ailleurs. Cela est sans doute vrai, mais quel homme
poursuivrait la science et la technique si elles ne sont pas faites pour faire
vivre le plus longtemps la nature et l’homme et dans les meilleurs des états de
leur santé et de leur satisfaction. Si les Anciens à Yokaam n’avaient pas la
science de la Nature, ils avaient alors l’amitié pour se faire entendre d’elle,
puisqu’aux Assises du Khoy de Wéthiar Ndigil quelque part dans l’Etat de
Pagaal, les Anciens demandaient à la Nature
de pleuvoir et elle arrivait toujours au jour promis.
PHILOSOLIDAIRE/Association Architecte du Bien (AAB)14252 but non lucratif - Des femmes et des hommes libres engagés, qui rêvent, pensent et agissent individuellement et ensemble pour que la Terre soit toujours et partout un lieu de satisfaction universelle de l'individu, de la société, des groupes sociaux et du monde dans les champs de CAUSES:Droits de l'homme, Éducation, Environnement, Santé, Petite Enfance, Femme, Culture, Économie et travail contre la Pauvreté
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