samedi 28 mai 2011

Werner Heinsenberg/l'esprit d'abord l'action ensuite comme les Anciens grecs




Personne ne sait ce que l'avenir nous réserve,ni quelles sont les puissances spirituelles qui gouverneront le monde,mais il nous faut commencer par croire à quelque chose et vouloir quelque chose.

  Nous voulons que la vie spirituelle redevienne florissante ici, et qu’ici, en Europe, continuent à naître les idées qui déterminent l’aspect du  monde. Nous engageons notre existence sur la pari que, dans ma mesure où nous saurons nous souvenir de notre origine et retrouver le chemin vers la coopération harmonieuse des forces de notre continent, même les conditions matérielles  de la vie en Europe deviendront plus heureuses qu’elles ne le furent au cours des cinquante dernières années. Nous voulons que notre jeunesse, en dépit du chaos extérieur, grandisse dans l’atmosphère spirituelle de l’Occident, et qu’elle puise aux sources de la force qui a fait vivre notre continent pendant plus de deux mille ans. Nous nous soucions qu’en second lieu des point de détail !Il n’est pas d’une importance primordiale que  nous nous déclarions pour l’enseignement humaniste ou pour un autre système scolaire. Mais en tout cas et avant toute chose, nous devons nous déclarer pour l’Occident.Werner Heisenberg, La nature dans la physique moderne, éditions Gallimard, 1962, p.78.

vendredi 27 mai 2011

Werner Heisenberg sur valeurs matérielles et valeurs spirituelles au cours de l'histoire

Finalement et en troisième lieu, ils affirment tout aussi justement que la fréquentation des Anciens procure à l’homme une échelle de valeurs où les spirituelles priment les matérielles. Car c’est précisément chez les Grecs que la suprématie du spirituel est immédiatement perceptible dans tous les vestiges qu’ils ont laissés. Il est vrai que sur ce point nos contemporains peuvent objecter que l’époque actuelle nous montre l’importance de la puissance matérielles, des matières premières et de l’industrie et que la puissance matérielle l’emporte sur tout pouvoir spirituel. Il n’est en rien conforme à notre époque, diront-ils, de vouloir inculquer aux enfants une surestimation des valeurs spirituelles par rapports aux matérielles.
Werner Heisenberg, La nature dans la physique moderne, traduit de l’allemand par Ugne Karvelis et A.E.Leroy, éditions Gallimard, 1962, p.63.

Werner Heisenberg sur culture humaniste et science de la nature


 On se demande souvent si les connaissances acquises au lycée ne seraient pas de nature trop théorique, trop étrangères au monde et si, à notre époque caractérisée par la technique et les sciences de la nature, une formation plus pratique ne serait pas susceptible de nous préparer à la vie de façon plus adéquate. Ceci  nous conduit à la question, fréquemment soulevée, des rapports entre la culture humaniste et les sciences modernes de la nature. N’étant pas pédagogue et ayant peu réfléchi à ces problèmes, je ne peux pas traiter du fond de cette question. Mais je peux essayer de me rappeler mes propres expériences ; j’ai moi-même fréquenté le lycée et j’ai par la suite consacré la plus grande partie de mon travail aux sciences de la nature.
Werner Heisenberg, La nature dans la physique moderne, traduit de l’allemand par Ugne Karvelis et A.E.Leroy, éditions Gallimard, 1962, p.61.

jeudi 19 mai 2011

Werner Heisenberg , La nature dans la physique contemporaine



Commençons par une rétrospection jusqu’aux racines historique des sciences modernes de la nature. Lorsque cette science fut fondée, au XVIIème siècle, par Kepler, Galilée et Newton, il existait encore l’image de la nature du Moyen Age qui voit en elle, avant tout, ce que Dieu a créé. La nature était considérée comme l’œuvre de Dieu. S’interroger, indépendamment de Dieu, sur un monde matériel, avait semblé, aux hommes de cette époque, dépourvu de signification. Comme document de ce temps je voudrais citer les mots par lesquels Kepler termine le dernier volume de son Harmonis cosmique : «je te remercie, mon Dieu, notre créateur, de m’avoir laissé voir la beauté de ta création et je me réjouis des œuvres de te mains. Vois, j’ai achevé l’œuvre à laquelle je me suis senti appelé, j’ai fait valoir le talent que tu m’as donné ; j’ai annoncé aux hommes la splendeur de tes œuvres : dans la mesure où  mon esprit limité a pu les comprendre, les hommes en liront ici les preuves » 
Mais en quelques dizaines d’années l’attitude de l’homme à l’égard de la nature changea fondamentalement. Dans la mesure où le savant pénétrait les détails des phénomènes de la nature, il  comprenait que, en fait, comme Galilée avait commencé de le faire, on pouvait dégager de l’ensemble certains phénomènes de la nature, les formuler mathématiquement et par là les « expliquer ».
Werner Heisenberg, La nature dans la physique contemporaine, Gallimard, 1962.

dimanche 15 mai 2011

Anniversaire Association Architecte du Bien (AAB)


DEUXIÈME ANNIVERSAIRE
ASSOCIATION ARCHITECTE DU BIEN (AAB)
Réc. N° 14252/MINT/DAGAT/DEL/AS  DU 23-12-2009
« La solidarité est notre puissance et le bien notre horizon »
    
SAMEDI 21 ET DIMANCHE 22 MAI 2011
A PARTIR DE 10 HEURES
DANS LA COUR DU LYCÉE DES PARCELLES ASSAINIES
LE CLUB PHILOSOLIDAIRE DE AAB
         VOUS INVITE
A REVOIR LA PHILOSOPHIE
AVEC UN POOL DE PROFESSEURS

samedi 14 mai 2011

Ruwen Ogien,"la honte est-elle une vertu?"



Le conséquentialisme nous propose une procédure de décision morale. Il nous demande de nous placer dans une situation telle qu’il soit possible de comparer deux ou plusieurs lignes d’actions selon leurs résultats, et il nous recommande de choisir celle qui produira le meilleur résultat général tel qu’il est jugé à partir d’un point de vue impersonnel qui donne un poids égal aux intérêts de chacun. Ce genre de principe est souvent rejeté sous les prétexte qu’il est trop « abstrait ».Mais en fait, c’est lui qui inspire une éthique qu’on a plutôt l’habitude de dire « concrète » :l’éthique de la responsabilité par opposition à l’ éthique de la conviction.



On pourrait envisager la possibilité que le meilleur résultat général sera toujours celui qui vient en conséquence d’actions accomplies conformément à certaines règles de devoir et d’obligation (« ne pas mentir », « ne pas tuer des innocents », »tenir ses promesses »,etc.).Mais la possibilité existe aussi que tel ne soit pas le cas. Il suffit de penser au fameux exemple discuté par Kant. Pour échapper aux assassins qui le poursuivent un ami innocent se réfugie chez moi. Les bourreaux se présentent à ma porte et me demandent : « Ton ami est-il chez toi ? » Si j’agis conformément à la règle qui prescrit de ne mentir en aucune circonstance, mon ami innocent sera probablement assassiné. 

C’est exactement dans ce genre de situation que la distinction conséquentialisme/déontologie paraît évidente. Le conséquentialisme et la déontologie s’accordent sans aucun doute pour reconnaître qu’un état de chose dans lequel la vie d’une personne  innocente est sauvée est préférable à une autre dans lequel cette personne serait assassinée. Mais ils s’opposent relativement à ce qu’il faut faire dans ces circonstances. L’éthique déontologique affirme que, même dans ces cas, ces règles de devoirs ou d’obligations doivent être respectées. Autrement dit , pour l’éthique déontologique d’inspiration kantienne, certaines règles doivent être respectées quelles que soient les conséquences. D’une autre façon ce qui caractérise le conséquentialisme c’est le refus d’endosser cette attitude…

A côté de ces deux grandes théories morales ( et en réaction contre elles),il existe une autre façon de concevoir l’éthique, plus ou moins inspirée d’Aristote. Elle n’ d’Aristote. Elle n’insiste ni sur les états de choses ni sur les actions, mais  sur le genre de personne qu’il convient d’être, de sentiments qu’il  est bon d’éprouver, de dispositions qu’il est souhaitable de cultiver. On l’ « appelle éthique des vertus »
Ruwen Ogien, La honte est-elle immorale ?, « la honte est-elle une vertu ? », Collection Le temps d’une question, Editions Bayard, octobre 2002,pp.125-127.



mercredi 11 mai 2011

Ruwen Ogien/ et les autres sur l'avenir de la honte dans les scoéiétés "libérales"

En fait rien n’interdit de penser que nos sociétés « libérales » sont de véritables machines à produire de la honte. Tout s’y  résumerait à une sinistre compétition en vue de la  gloire et de la réussite matérielle personnelle. A l’issue de la lutte, il y aurait des « gagnants » (plutôt riches, instruits, bien portants, etc.) et des «  perdants » (plutôt pauvres, ignorants, malades, etc.).Pour les «perdants» la honte s’ajouterait aux autres désagréments. Comme les « perdants » sont  nombreux (ou plus nombreux, en tout cas, que les « gagnants »), la honte serait, dans nos sociétés, bien que peu perceptible, car les gens cachent non seulement  ce dont ils ont honte mais aussi le fait d’avoir honte. Bref, selon ce second diagnostic, la honte ne serait pas du tout en voie de disparition dans les sociétés « libérales ».Elle y serait plutôt promise au bel avenir.
Ruwen Ogien, La honte est-elle immorale ?,Bayard,2002,p.21.

mardi 10 mai 2011

Ruwen Ogien et d'autres sur "la place de la honte dans les sociétés...



Concernant la place de la honte dans nos sociétés dites « libérales », il existe des diagnostics particulièrement contradictoires .
Selon le premier, le sentiment de honte est  en voie de disparition ; d’après le second, il se répand de plus en plus massivement.
Ceux qui croient au déclin de la honte semblent penser qu’il  n’est pas nécessaire de faire une enquête approfondie pour s’apercevoir que la honte rapportée au corps, à la nudité, à l’intimité, a globalement disparu, en raison de la plus grande tolérance sexuelle et de la suppression des barrières de la pudeur et de la pudibonderie qui l’accompagne. L’exhibitionnisme massif dont la télévision, l’ordinateur et la vidéo seraient devenus  les véhicules (des émissions du genre« Confessions intimes » ou «Ça  va se savoir » à la pornographie amateur , en passant par les sites Internet  de  type « Je montre tout » )serait une expression particulièrement frappante de ce phénomène. Mais le déclin  de la honte ne se manifesterait pas seulement dans le domaine corporel ou sexuel. Il se donnerait aussi à voir dans l’absence totale de retenue qui accompagne l’expression publique du désir d’être « riche et célèbre » .Les plus inventifs (ou les plus paranoïaques) ajoutent que ce déclin s’exprime de façon un peu moins évidente, mais beaucoup plus alarmante, dans une sorte de cynisme ou d’indifférence à l’égard de certaines règles de justice. Il n’ y aurait plus de honte à « voler de l’argent dans la sébile d’un aveugle » ou «  à se livrer à des escroqueries  sur des vieillards  et des enfants, si on se trouve à la tête d’institutions qui en ont la charge ».Bref, ceux qui croient au déclin de la honte voient  un peu partout des signes qui confirment  leur diagnostic, ce qui n’est pas étonnant . S’ils sont philosophes ils ont aussi tendance à tirer de ce diagnostic toutes  sortes de grandes conclusions politiques et morales. Selon Water Berns, le déclin de la honte est une menace contre la démocratie, car la honte promeut le contrôle de soi nécessaire à cette forme de gouvernement. D’après  Aaron Ben Ze’ev, c’est notre humanité même qui est même par ce supposé déclin de la honte, car c’est notre capacité à éprouver ce sentiment qui fait de nous des humains (ou qui protège notre humanité).
Ruwen Ogien, La honte est-elle immorale ?


Ruwen Ogien est directeur de recherches au CNRS. Son travail est axé sur la philosophie analytique, dans les domaines de la morale, de l’action, des émotions et des sciences sociales. Il a publié notamment la Faiblesse de la volonté(PUF),un portrait logique et moral de la haine (L’Eclat),Les causes et les raisons, Philosophie analytique et sciences humaines(J. Chambon)