mardi 5 janvier 2016

Du Métier de berger et de la Bonne gouvernance


                               

                    

RECHERCHES ET REFLEXIONS
SUR LA SURVEILLANCE DE L’EXISTENCE 
  ET SUR LE METIER DE BERGER

 

 


" Nous nous  séparons insensiblement de nous-mêmes",

ANNE DUFOURMANTELLE, Eloge du risque.
                              

I.                   GOULMAAM

      UN AVEUGLE A LA RECHERCHE D’UN CERTAIN POUVOIR

 

J’ai rencontré aux Assises du Khoy de Wéthiar Ndigil, un homme se présentant lui-même au nom de Goulmaam. Il aveugle et personne ne peut douter de son état de non voyant en voyant l’immense et monstrueux vide que ses yeux arrachés par la nature ou par quelque accident ou des accidents successif dans son histoire, ont laissé dans son corps, même si nécessairement, il n’est pas absolument aveugle. Il dit, mais cela est plus difficile à vérifier, qu’il aurait tout oublié ou alors beaucoup oublié au cours de son chemin. Mais il sait qu’il n’a pas tout oublié et qu’il n’a pas oublié l’essentiel. Il n’est pas seulement séparé de ses yeux, parce que ses yeux sont naturellement et habituellement dans les corps des choses et des êtres de l’existence pour les mener à une certaine destination connue d’eux dès le départ de leur mouvement, ou progressivement découverte ou restant fondamentalement inconnue, même si parfois on voit l’existence s’en aller comme s’il ne craignait point de s’égarer. Mot à mot, Goulmaam veut dire « être égaré ». Je ne sais pas aussi si on peut le toujours le prendre au sérieux. Tantôt il dit porter un âge que portent et que portèrent ses contemporains, tantôt il se déclare d’une longévité qu’une certaine raison ne saurait accepter sans prudence si elle ne s’empressait pas de la rejeter, si elle n’est pas sur les chemins de la philosophie et de la science dans lesquels les humains sont toujours disposés et ouvert à l’inconnu et à la surprise, à tous les possibles. Au jour où je l’ai rencontré aux Assises du Khoy de Wéthiar Ndigil à Pagaal, les Assises de l’esprit ou de la Mémoire ou de l’âme dont on dit qu’il n’oublie rien de ce qu’il a vécu et de ce qui lui est annoncé et qui est en route mais qui n’est pas encore arrivé dans l’intimité de tous, il disait être à sa 496 années depuis sa séparation avec d’d’autres voyageurs qu’il doit nécessairement rencontrer pour retrouver ses yeux perdus et leur pouvoir et ensuite atteindre ce qu’il cherche et en même temps voir ces autres compagnons dont il est séparé arriver enfin à leur fin personnelle et collective. Les autres, c’est une femme enceinte qui s’appelle Moselle. Elle est amnésique, sourde, aveugle et muette. Elle est en compagnie d’une matrone, qui pourrait je crois aussi être une prêtresse et encore une législatrice, parce qu’elle s’appellerait Jotnaam Ndigil, pour désigner mot à mot, celui ou celle, le pouvoir qui fait traverser la vérité. L’autre, c’est Yaakaar, qu’il soit une fille ou un garçon, qu’il s’agisse d’un seul nouveau-né ou de plusieurs en même temps, il recevra toujours le même nom, signifier l’Espérance. Le problème de Goulmaam qui dit être un ancien chasseur de fauve reconverti en Défenseur des droits universels qui pourraient et devraient être uniformément partagés et défendus par tous les humains, il portait un arc et une flèche en tout cas.  Je ne sais pas si Goulmaam est né aveugle ou s’il l’est devenu accidentellement, je l’ai seulement entendu dire de lui-même qu’il aurait entendu depuis le ventre de sa mère, une partie de son destin ou tout, mais avec beaucoup d’oubli, sauf cette voix qui lui annonça de l’intérieur qu’il serait aveugle et par laquelle il dit avoir entendu de suite, la promesse qui lui annonça la possibilité pour lui de retrouver ses yeux perdu et le pouvoir qui leur est attaché. Il ne sait pas exactement depuis quand il est en route. Il sait seulement que c’est depuis le jour où il s’est converti en Défenseur des droits de l’homme. Je crois, mais ce n’est pas certain, que Goulmaam né pas né aveugle, puisqu’il m’est difficile qu’un aveugle puisse être un chasseur de fauve depuis les premiers pas de l’homme sortant à peine avec dit-on très peu de connaissance de lui-même et de la nature, avec le minimum de connaissance, de science et de technique. Or, c’est un jour de chasse, celui de la reconversion, qu’il s’est rendu compte qu’il ne pouvait plus voir aucune cible de celles qu’il chassait dans la nature, mais seulement cette cible qu’il venait d’atteindre de sa flèche intensément et instantanément  mortelle et qui pourtant, pendant longtemps, se mit à lui répéter « Tu m’as atteint, tu nous as atteint. Que voudrais tu donc de ma mort ? » Il entendait alors d’immenses essaims de voix du monde l’interpellait de toutes part par la même question dit-il, mais il ne voyait plus rien. Il s’est alors entendu dire qu’il lui fallait si elles ne mourraient pas, suivre ces vies qu’il venait d’atteindre de sa flèche mortelle dans un immense buisson dans lequel s’était réfugié un fauve qu’il poursuivait, un loup avait-il dit je crois, dont il confondit avec l’autre cible dans le même refuge. En ce temps, c’est la matrone Jotnaam qu’il ne vit pas mais qu’il entendait à ses pieds et qui était non loin des lieux qui le lui fit savoir, « Le pouvoir qui devait assurer la surveillance publique de la cité ne devait accoucher et ne naitre au milieu de la cité, mais dans la nature la plus hostile à l’existence ». C’était selon Goulmaam qui le tiendrait de la matrone en compagnie de Mosselle, une manière de tester sa viabilité, son efficacité, sa résistance, mais aussi sa légitimité. Je ne sais pas si un homme peut dire d’un autre qu’il est libre ou heureux ou malheureux comme il n’est pas évident pour moi de savoir si je suis libre ou heureux, si j’ai déjà été libre ou heureux. Malgré tout, il est possible de le regarder comme un homme heureux, même s’il déclare lui-même qu’il cherche à être enfin libre. Je ne l’ai pas entendu dire qu’il se sentait malheureux ou coupable. Je l’ai entendu remercier son Dieu et  divinités particulièrement attachées à son intimité, ses pangols, d’avoir donné à cette vie humaine qu’il venait d’atteindre d’une flèche qui eut raison des fauves les plus féroces connus de lui alors, une si grande résistance ou peut-être d’avoir neutralisé ou altérer la charge du pouvoir de sa flèche. Il a pleuré abondamment malgré son âge, pensant sans doute aux conséquences qui devraient arriver si le contraire de ce qui arriva avait pris le dessus. Ce n’est pas seulement Mosselle et Yaakaar qui allaient mourir ; ce serait un monstrueux génocide, un carnage, une extermination abominable si Mosselle et Yaakaar avaient péri de la flèche empoisonnée d’un chasseur de fauves. C’est tout un peuple dont il ne connaît rien de sa dimension, mais peu importe, puisqu’il n’existe pas de peuple grand ou petit, même si un peuple peut être petit par son territoire, par sa science ou par ses technique pour assurer sa surveillance et devoir compter sur l’assistance d’un autre plus grand, plus vigilant, plus informé du monde et de l’homme. Tous les peuples poursuivent une fin et une fin n’est jamais petite. Il peut y avoir peut être aussi de petites fins et de grandes fin pour soi, pour autrui ou pour tous et pour le monde, mais je crois que Goulmaam s’estime heureux et ce n’est pas sans raison. Depuis que son peuple s’est établi dans le monde en tant que peuple et en tant que nation, en tant que corps et esprit, chez Mosselle, c’est le plus beau des humains qui est le siège du pouvoir public.  Cet femme que Goulmaam cherche à rencontrer depuis leur séparation fut la plus belle de tout son peuple et c’est en elle que le pouvoir s’est établi le pouvoir public.  Je ne sais pas d’où vient Goulmaam puisque lui-même ne se souvient exactement de tout, mais je crois qu’il doit venir de très, très loin de moi, même si au s’il n’est pas à la même distance de tous les autres témoins au sein de cette assemblée où j’ai fait accidentellement, peut-être aussi par la providence ou par quelque autre pouvoir inconnu du monde me voulant autre chose que le bien. Combien d’institutions sociales, morales, éthiques ou politiques valides ou d’une autre nature, une société, un peuple, une nation peut-il avoir ? Je ne prétends pas le savoir, même si comme tous les humains, je peux me sentir très éloigné des autres ou d’un autre surgissant en moi ou en dehors de moi. Lorsque le peuple s’est réuni à la Place des Origines, alors que chaque corps et chaque âme s’était disposée de la même manière et à une distance régulière les corps et les âmes à côté les uns des autres et tous déshabillés, au réveil, ils  se sont tous retrouvé autour d’un corps à moitié nu, celui d’une femme dont le visage est caché et dont personne ne pouvait dire après vérification de la présence de tous ce qu’il connaissait, de quel visage il s’agissait. Et puis, on demanda à corps présent parlant consciemment et peut-être aussi inconsciemment « Quel est ce visage parmi nous » Et on entendit le visage lui-même demander «  Qui suis-je et que suis-je pour vous ? » Goulmaam n’est pas un témoin de cela, il l’a seulement entendu de la matrone de Mosselle, celle du peuple et du pouvoir politique. C’est toujours, c’est peut-être encore le cas aujourd’hui, dans les mains de la matrone du peuple que naît le pouvoir et c’est dans ses seins qu’il grandit. C’est tout son peuple sans exception aucune qui lui a donné son nom. Il l’appela Mosselle Yaakaar avant de tirer le voile et il vit qu’il ne s’était pas trompé, qu’il est impossible que tout un peuple s’accorde dans l’erreur, c’est pourquoi lorsque cela arrive dans quelque assemblée, il faut se dire qu’il y a une voix qui n’a pas parlé ou qui n’a pas sérieusement parlé. Elle s’appelle Mosselle parce qu’elle est la plus belle jusqu’ici pour son peuple. Elle s’appelle Yaakaar, parce qu’elle n’est pas seulement la plus belle, mais celle en qui se contiendrait l’espoir le plus étendu. Cette femme que Goulmaam qui se déclare lui-même égaré cherche à rejoindre par un chemin dont il ne sait plus rien de la direction ni des traces, s’appelle Mosselle Yaakaar, bien avant la conception de l’enfant qu’elle porte encore dans son ventre.  Mais Yaakaar, c’est l’esprit du peuple, la volonté du peuple, l’âme du peuple, le capital existentiel primitif du peuple qui s’incarne dans son intimité, avant que son visage ne soit découvert. Si le peuple découvrait que Mosselle était laide selon leurs critère de mesure d’alors, elle serait lapidée sur le champ, parce que le peuple aurait dit qu’il s’agit d’un pouvoir d’un ennemi qui cherchait à usurper leurs pouvoirs individuels et leurs pouvoirs publics. Elle pouvait aussi être belle mais sans être aussi vaste et constitué ou éduquée pour contenir tout le peuple et à cette époque-là chez eux, selon Goulmaam, pour parler du pouvoir, son peuple disait que «  La mère du peuple doit toujours se coucher sur le dos ses seins jaillir de tout son corps pour répondre aux appels de sa progénitures vivant de mille et une choses.  C’est donc avec la plus haute des beautés que son peuple pouvait encore atteindre des humains parmi ses membres et dans la plus étendue des fécondité qu’on peut attendre d’une femme que Mosselle prit congé des siens discrètement, pour aller accoucher en pleine nature, dans un lieu connu de la matrone et peut-être de quelques autres assistants nécessaires pas nommés parce que peut être connus de Goulmaam. C’est donc dans un immense espoir de les revoir revenir ensemble dans la santé la plus sûre pour un peuple. Tout n’est pas perdu. Il serait promis à Goulmaam et à Mosselle et à Jotnaam Ndigil de se rencontrer quelque part dans le monde où ils retrouveraient chacune, chacun et ensemble et au milieu de leur peuple qui les attend, toutes leurs facultés, toute leur beauté et toute leur science et art perdus et se séparant de plus en plus de au fur et à mesure qu’il avance et s’éloignent des lieux de l’accomplissement des promesses qui leurs sont faites et qui sont faits à leur peuple. Ils ne sont pas morts, mais depuis qu’il les a atteints par ses flèches, leur histoire semble inversée totalement. Ils s’approchent de plus en plus du contraire de ce qu’ils devraient être. Peut-on se demander qu’est-ce que cherche un aveugle, une femme enceinte, un enfant dans le ventre de sa mère depuis autant d’années, un peuple qui a déposé tous ses pouvoirs vitaux dans le corps d’une femme et d’un enfant et qui a tout confié à une matrone dont il n’a jamais douté ni de sa science ni de sa loyauté ? Il peut être néanmoins utile de le dire clairement. Dans les eaux du fleuve Pagaal qui passe par toutes les terres du monde et par les côtes les plus profondes sous la terre en surface, il y aurait selon Goulmaam, une pirogue transportant Mosselle, Yaakaar et Jotnaam en direction d’une cité où ils entendent les appelle de leur peuple attendant toujours leur retour avec l’essentiel pour tous et pour chacun. Le problème de Goulmaam c’est que nulle part sur la terre, il n’entend ses appels, même s’il déclare, malgré sa séparation d’avec les yeux habituels de son corps dans tous les corps humains, toujours voir et en toute transparence les voyageurs dont il parle et qu’il cherche à rejoindre dans les lieux de la délivrance. De sa bouche, je l’ai entendu dire, qu’il avait beaucoup oublié et qu’il se sentait relativement déchargé de son oubli et de son problème, quand il est arrivé au milieu de l’assemblée des Assises de Wéthiar. J’avais entendu dire avant d’arriver ici, qu’il existe quelque part dans le monde une assemblée au sein de laquelle tu pourras encore te souvenir pour ne jamais oublier ou avant d’oublier à nouveau. Je crois disait-il alors et apparemment bien déchargé mais encore très relativement, que c’est bien cette assemblée ou une des divisions de cette assemblée. Parce qu’ici, je souviens maintenant de ce que je cherche, de ce que ces autres dont je suis séparés cherchent dans le même monde et que nous ne saurions avoir séparément. Nous cherchons un pouvoir. Un pouvoir comme n’importe quel pouvoir, c’est-à-dire, une source matérielle ou spirituelle capable de penser et d’agir pour influencer positivement ou négativement l’existence de quelque chose ou de toute chose.

Nous sommes, tous les autres comme moi et comme nous, à la recherche d’un pouvoir dont l’essence consisterait à rapprocher toutes choses de la nature et tout être en dehors de la nature, de ce dont il est séparé effectivement, ou se sent séparé ou craindrait d’être séparés, et qui lui est nécessaire ou au moins utile, pour chercher et atteindre,  ou espérer se rapprocher le maximum possible, de sa fin individuelle ou collective.

 

 

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